L’Odyssée. Douzième chant.
Le chant de l’imbécillité humaine. Manifestement universelle. N’y voir aucune correspondance actuelle. Mais dans le chant douze, l’idiotie est active, permanente, principale, incontournable. L’idiotie, non. L’imbécillité.
Ulysse quitte les enfers et vient d’entendre Tirésias, le devin aveugle de Thèbes. Oh déjà, à Thèbes, sur l’imbécillité il y a beaucoup à dire. Tout le monde est prévenu de ce qui va se passer. Par Tirésias, justement. Et malgré toutes les précautions cela se passe. Personne ne voit qu’il est en train de participer à la chose que se passe. L’imbécillité. A Œdipe l’on dit qu’il tuera son père et qu’il couchera avec sa mère… et Œdipe, sortant de l’oracle, tue un homme bien plus vieux que lui et rejoint la couche d’une femme qui pouvait être sa mère. A quoi a-t-il pensé ? Et sa mère à lui, qui accueille en sa couche un homme aux pieds percés, comme son bébé eut à le subir… ?
Revenons au chant 12.
Ulysse quitte les enfers. Tirésias lui a dit de ne pas toucher aux vaches du dieu Soleil. Ulysse rentre chez Circé qui lui répète de ne pas toucher aux vaches du dieu Soleil. Puis elle lui donne la route. Il faut éviter Charybde sans pour voir éviter Scylla. Il y aura des morts sur le chemin maritime. A Charybde, tous mourront. A Scylla, ils ne mourront que par 6… Choisit, mon frère. Et Ulysse se remet en route.
Il y a un court épisode où Ulysse s’attache au mat, et où ses hommes s’emplissent les oreilles de cire pour ne pas entendre le chant des sirènes. Se boucher les oreilles ? A quoi cela peut bien faire référence ? Franchement, je ne vois pas ? L’homme serait-il sourd ?
Les sirènes sont passées sans encombre. Voici Charybde et Scylla. Ou tu meurs englouti. Ou tu sacrifies 6 membres de ton équipage. Un homme par tête du monstre à 6 cous. Ulysse, rompu à Koh-Lanta, évite Charybde, choist Scylla et sacrifie 6 hommes. Et ça passe comme ça. Mais la nuit arrive. Il faut dormir après les horreurs. Ulysse veut continuer. Euryloque n’est pas de son avis. Il veut dormir, et manger. L’on s’arrête donc sur l’Île du dieu Soleil. Ulysse a beau prévenir que c’est un endroit dangereux, rien n’y fait. Les hommes veulent dormir. Nous voilà donc sur l’île du dieu Soleil, dont il ne faut pas toucher les vaches…
Ulysse n’a pas dit cela. Il a dit que l’île et le dieu étaient dangereux. Peu importe, on veut dormir.
Ils dorment donc. Sur l’île. Et à cause des vents contraires, sur cette île, ils vont rester un mois.
Au départ ils mangent les réservent données par Circé. Mais au bout d’un mois les réserves viennent à manquer…
Plus de vin, plus de viande, plus de farine…
« Les ventres se tordent ».
Et puis Ulysse s’endort. Non s’en avoir dit de ne pas toucher aux vaches. Mais Euryloque, durant le sommeil d’Ulysse, convainc tout le monde : mieux vaut mourir ici le ventre plein, que mourir ici le ventre vide… Et voilà que l’on dépèce les vaches. Tirésias avait dit l’interdit. Circé avait répété l’interdit. Ulysse, avec maladresse, avait répété lui aussi l’interdit. Rien n’y fit. Les vaches ont terminé en méchoui.
L’imbécillité, je vous dis. Qu’on appelle aussi le destin. Qui fait aussi que celui ou celle qui ne doit pas y aller, y va quand même…
Tous arrivent à fuir l’île après le barbecue. Mais au milieu des flots Zeus foudroie le navire et la tempête achève l’équipage. Seul Ulysse s’accroche au mat flottant. Mat qui retourne vers Charybde et Scylla. A gauche la mort. A droite la mort… Ulysse miraculeusement s’en sort. Et arrive chez Calypso… Nous voilà donc rendu au début du récit de l’Odyssée. Au chant 5 précisément, mais aussi au chant 1. Ou tout le récit a commencé par Ulysse chez Calypso. Ulysse restera 10 ans chez Calypso, pleurant chaque jour.
Il eut suffit que ces gens ne mangent pas les vaches du Soleil, pour qu’Ulysse rentre peinardement chez lui… Il était prévenu. Il les avait prévenu. L’homme est un imbécile.